mercredi 7 mars 2012

Episode 7

[Les cinq paragraphes ci-dessous appartiennent à cinq feuilletons distincts. Ces cinq paragraphes ne se suivent pas - mais font suite aux précédents épisodes des mêmes auteurs.]


(Suite de l’histoire n°1) “- Françoise est bibliothécaire. Elle a les cheveux rouges et courts, des grandes lunettes papillon bleues, et une cane. Elle a eu un problème de genou, et depuis elle ne marche pas bien. Ca lui donne une drôle d'allure, clopin, clopant, qui va très bien avec son rire. C'est elle qui est venu voir la petite fille, alors qu'elle errait, l'air triste, entre les rayons botanique, science et technique de la bibliothèque.
- Tu aimes les fleurs ?
- Oh oui, beaucoup ! Mais les histoires de ces fleurs ne sont pas drôles. Souvent, le soir, quand je lis sous ma couette, avec ma lampe de poche, je m'endors avant la fin. C'est pas vraiment des histoires, si ?
- Non, c'est pas des histoires. Même si ça raconte beaucoup de choses. Tu veux des belles histoires ? Tu sais qu'on a plein de livres pour les enfants, en bas, plein d'images, plein de fleurs aussi.
- Oui, je sais, mais ça m'endort aussi, un peu. Je voudrais que les personnages me parlent plus pour de vrai. Qu'il y ait un vrai monde. Il y a des histoires comme ça ?
- Oh oui ! Des tas ! Si tu veux, je peux te faire lire mes livres préférés, à moi. Il n'y a pas toujours des fleurs. Mais un vrai monde, oui.
- Sans monstres dans les ombres ? J'aime pas les monstres, les ombres.
- Sans monstres et sans ombres. Des histoires pleines de lumières. Qui font comme une deuxième maison, où on oublie tout.
- Alors, tous les mercredis après-midi, la petite fille allait voir Françoise. Elle lui offrait un chocolat, un livre, et elles parlaient, riaient, dessinaient. La petite fille avait découvert le roman.” (Jessica Thomas)


(Suite de l’histoire n°2) “Le vieux n'avait pas répondu au Cafard. Il sortit en titubant du
Mouton Tordu. Sans avoir bu plus qu'un petit marc, il voyait les
maisons à l'envers. Les lumières l'aveuglaient, projetant des ombres
monstrueuses, de grosses fleures boutonneuses le guettaient dans les
coins. Il fit d'un vieux bâton une canne pour rentrer chez lui ; mais
l'eau qui semblait passer par-dessus le pont-au-Couillon l'attirait
comme un aimant. Il perdit connaissance. En rouvrant l'oeil, la
première chose qu'il vit la face désolée et inquiète du Jeune Garçon.” (Fr.)


(Suite de l’histoire n°3) “C'est ainsi que Sabou devint nos yeux et nos oreilles et que, peu à peu, fut franchie la distance qui nous séparait de notre camarade. Faisant fi de toute crainte, juché sur un épais sapin surplombant le camp gitan, il nous rapportait quantité d'informations que notre imagination enfièvrée avait tôt fait de transformer en fantasmes les plus délirants. Et, du fond de notre cabane - un fossé recouvert de planches au milieu desquelles un pneu constituait l'unique ouverture -, nos conversations d'enfants roulaient, transformant les gens du voyage en créatures fantastiques, ogres, vampires ou loup-garous, témoins de nos angoisses les plus secrètes et de nos préjugés.” (Fabrice)


(Suite de l’histoire n°4) “Après avoir feint l’indifférence pendant un bon quart d’heure, mais incapable de résister à l’attraction de l’odeur et de la voix familières, le chat Maurice avait fini par sauter sur les genoux de son vieux maître. Encore dix minutes, et il consentirait à ronronner.
Le visage du professeur Duplessis s’était assombri. Pauvre Geneviève, dont plus personne ne fleurissait la tombe qu’un ancien amant dont elle avait dû oublier le nom, mais qui savait la faire rire les soirs de camping au bord de l’eau, en grimaçant au dessus de sa lampe de poche.
- Comptez-vous donc le rencontrer, ce détective ? demanda Marie-Reine.
Duplessis revint à lui.
- Oh, au point où en sont rendues les choses, je pense que oui. Cette histoire m’intrigue, j’aimerais comprendre, je vais lui donner rendez-vous chez moi. S’il porte un imperméable et un feutre mou, ça donnera l’occasion aux voisins de jaser.
” (AB)


(Suite de l’histoire n°5) “Le ferry d’F. avait largué les amarres à 20h. La terre s’éloigna puis disparut. Partout autour d’elle la mer. Dans les derniers rayons du soleil on pouvait voir danser des dauphins. Elle ne regrettait finalement pas d’avoir pris par erreur le mauvais avion. La traversée lui permettrait de mieux méditer ce qu’elle allait dire à Alex. Il ne soupçonnait sans doute pas qu’elle avait découvert sa relation avec I., que le bouquet envoyé à l’Autre lui était parvenu à elle. Ils avaient dû se rapprocher en travaillant sur le chantier du nouvel accélérateur de particules (elle croyait se souvenir qu’il lui avait présenté I. comme étant ingénieur spécialiste des phénomènes électro-magnétiques). Della linterna, c’était son nom. Une italienne installée à Barcelone mais qui, comme Alex, passait tout son temps à Genève. Elle se souvenait de la soirée organisée dans la maison de Vallvidrera l’été dernier. I. y portait une magnifique robe rouge Une belle femme incontestablement. Sur le pont, un jeune père jouait à effrayer son bambin en imitant un monstre tandis que le grand-père à la canne contemplait lui aussi la mer.” (AF)

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